Le thème du mois
“Fragments”
Le fragment, c’est la bribe, la fraction, le morceau, la partie plus ou moins importante d’un ensemble. En littérature, il peut s’exprimer sous des formes très variées : la pensée ou la maxime, le haïku ou le blason, la nouvelle ou le souvenir. Cette forme liée à la fulgurance, au pointillisme, à la brièveté, charrie souvent une réflexion sur la pensée, la mémoire, le dérisoire et l’essentiel. Avec, en prime, de la poésie et du jeu…My Book Box a voulu, sous les fragments d’ombre et de lumière estivales, vous faire découvrir trois magnifiques ouvrages.
Le premier d’entre eux, Jésus et Tito de Velibor Čolić, concentré d’énergie et d’émotion, nous emmène à l’est de l’Europe, dans la Yougoslavie de Tito des années 1970. L’auteur, dans une suite de courts chapitres autobiographiques drôles et touchants racontés à hauteur d’enfant puis de jeune homme, nous livre peu à peu les fragments de ses souvenirs et construit progressivement un vrai roman initatique, qui se clôt peu après les années de service militaire du jeune homme. En même temps qu’il nous livre une fresque intime et familiale, Jésus et Tito nous narre l’histoire, les fractures et le destin d’un pays lui-même bientôt voué au morcellement, dans une langue insolente et poétique.
On continue à voyager avec le deuxième livre de notre sélection : de l’Indochine plongée en pleine guerre du Vietnam jusqu’au Canada, la narratrice, double de l’auteure Kim Thùy, nous livre dans Vi le récit d’années douloureuses et belles à la fois : la fuite du Vietnam dans des conditions tragiques, la construction de son identité dans un pays étranger, les relations familiales, les histoires d’amour, les sentiments, les sensations…mimant là aussi le travail de la mémoire par une forme d’écriture aussi belle qu’originale, progressant par tableaux successifs, Kim Thùy fait de son héroïne un personnage que l’on n’est pas prêt d’oublier, porté par la douceur et la force de sa plume.
Et si on se racontait soi-même par les objets qui ont peuplé notre jeunesse ? C’est le pari que s’est lancé François Bon dans son étonnante Autobiographie des objets. Par le prisme de ces objets banals du quotidien qui l’ont entouré et vu grandir, depuis la photo de classe jusqu’à la cafetière, en passant par le pantalon patte d’eph, l’autoroute ou encore le transistor, c’est toute la mémoire intime et collective d’une époque – les trente glorieuses – et d’un enfant devenu homme puis écrivain – lui-même – que François Bon fait revivre. Après cette lecture, il est fort probable que vous vous essayiez vous-même au jeu !