Le thème du mois
“C’est la vie”
« C’est la vie », soupire-t-on parfois lorsque une tuile nous tombe sur la tête, en haussant les épaules de façon fataliste. Mais nous, à My Book Box, on aime bien prendre cette expression au pied de la lettre – et de façon optimiste : « c’est la vie », c’est aussi des millions de fragments de vie successifs, des bonheurs, des tranches de vie, des larmes, des fous rire, des colères, des espoirs, des désillusions…bref…la vie. Qu’est-ce qui, au bout du compte, construit une existence ? C’est à cette question (quasi philosophique, mais n’ayez pas peur) que tentent de répondre, chacun à leur manière, les trois romans de ce mois-ci.
Olive Kitteridge, d’Elizabeth Strout, est une merveille, et le jury du prix Pulitzer ne s’y est pas trompé en lui décernant son prix en 2009. Le roman, dentelle délicate et subtilement construite, se déroule à Crosby, petit port paisible du Maine, et s’étale sur une période de trente ans. Dans chacun des chapitres, qui pourrait presque constituer une nouvelle, apparaît Olive Kitteridge, personnage principal ou bien secondaire – ou même simple ombre passant de façon fugitive. La vie passe, les enfants grandissent, les époux meurent, les jeunes gens quittent le village, y reviennent, construisent et déconstruisent leur vie, et Olive Kitteridge vieillit. Le talent d’Elisabeth Strout est saisissant : une merveille, on vous l’avait dit.
Dans Effets secondaires probables, Augusten Burroughs nous offre 26 instantanés de sa vie, tous plus loufoques, absurdes, grinçants les uns que les autres, sans tabou ni la moindre complaisance avec lui-même. Se montrant tour à tour angoissé, hypocondriaque, ridicule voire pathétique, ce Woody Allen du roman répète inlassablement mais avec brio le vieux tour du comique cachant ses angoisses et sa détresse derrière des caisses de rire. Il fait de l’autodérision son trait stylistique le plus évident, dans un art et un sens de la formule uniques. Les effets secondaires sur ses lecteurs ? Le rire, tout simplement.
Avec Alma Whittaker, héroïne de L’empreinte de toute chose d’Elizabeth Gilbert, l’expression « c’est la vie » prend les accents romanesques de la liberté, de la connaissance et de l’appel du grand large. Contaminée par la passion de la botanique par son père, cette Américaine de Philadelphie, née avec le XIXème siècle, héritière du souffle du siècle des Lumières, avide de savoir et de découvertes, passera sa vie à tout explorer : la science, le monde, elle-même. Ce destin hors pair nous conduit des Andes aux Etats-Unis, de Londres à Tahiti. Un régal.